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Annaba. Activité industrielle : Seul l’agroalimentaire résiste

14/09/2009 - Lu 128993 fois
A Annaba, le secteur de l’industrie qui avait connu par le passé un développement important est, aujourd’hui, en train de péricliter. Aucun investissement, aucun projet d’envergure n’est venu le relancer ou, du moins, freiner cette descente aux enfers amorcée il y a plus d’une décennie. Les différentes réformes qu’avaient eu à «subir» le secteur secondaire avec les restructurations, les redéploiements puis la liquidation et la fermeture de centaines d’entreprises avaient porté un sérieux coup à l’économie locale.

Le complexe sidérurgique, qui avait catapulté cette ville de l’Est au premier rang de l’industrie nationale lui donnant le titre pompeux de capitale de l’acier, est lui-même confronté à des problèmes et pris dans la tourmente engendrée par une crise qui perdure. Le tissu des PME qui s’était développé tout autour est, lui aussi, frappé de plein fouet puisque plusieurs entreprises de sous-traitance travaillant dans les secteurs de la maintenance, de l’approvisionnement, de l’électricité ou de l’électromécanique, ont vu leurs contrats annulés. Des centaines de travailleurs ont été mis au chômage et une récession sans précédent avait amené une paupérisation ; tout l’édifice social avait vacillé.

L’agroalimentaire, alors florissant dans toute la wilaya, dans le triangle Annaba-Guelma-El Tarf avec 24 conserveries produisant des milliers de tonnes de tomates et employant près de 120 000 travailleurs directement ou indirectement dans le secteur, avaient fermé les unes après les autres. Deux facteurs essentiels avaient concouru à cette situation et ont été à l’origine de la catastrophe. Le premier a trait à la concurrence déloyale et avait porté un coup fatal à l’industrie locale. Le marché avait été inondé à l’époque -à la faveur de l’économie dite de marché- de conserves de tomates importées légalement ou illicitement de Tunisie, d’Italie, de Dubai, de Turquie et même de la lointaine Chine. Conséquence : les produits locaux étaient invendables parce que plus chers et ne pouvant concurrencer les produits importés sur le plan qualité. Le deuxième facteur était relatif à la perte de change générée par la dévaluation du dinar. Les conserveurs qui avaient contracté des crédits auprès des banques pour la réalisation et l’équipement des conserveries s’étaient retrouvés avec des dettes 10 fois supérieures aux montants des crédits alloués. Se retrouvant en situation de cessation de paiement, les organismes financiers devaient ester en justice les conserveurs et ont pour la plupart obtenu gain de cause. Les usines furent fermées pour être vendues aux enchères. En amont, c’est la culture de la tomate industrielle qui s’en est ressentie ; les récoltes avaient dans un premier temps été reprises à des prix en deçà de leurs coûts de production pour ensuite être refusées. Les producteurs avaient alors protesté et avaient été jusqu’à déverser des centaines de tonnes de tomates sur la route de l’aéroport, bloquant ainsi la circulation. Il avait fallu l’intervention musclée des forces de l’ordre pour rétablir la situation. Résultat : toute une filière a disparu du jour au lendemain. La plaine d’Annaba, celle d’El Tarf et les champs de Guelma et de Skikda ne produisaient plus de tomate industrielle. Des milliers d’ouvriers agricoles permanents et saisonniers s’étaient retrouvés sans emploi. Une somme d’expérience accumulée pendant des dizaines d’années ne servait plus à rien et chacun avait changé de métier, se retrouvant comme débutant dans d’autres secteurs. Il y a presque deux ans, le secteur a commencé à se relever et la reprise bien que timide commençait à s’installer malgré quelques freins qui subsistaient et qui empêchaient la région d’amorcer son décollage économique.

Quoi qu’on dise, la démographie des PME a connu au cours des années précédentes une courbe ascendante générant des milliers de postes d’emploi, certes insuffisants et en deçà de ce qui était attendu mais c’était toujours ça de gagné sur le chômage et ses conséquences néfastes. Ainsi, on compte aujourd’hui plus de 8 515 PME activant dans divers secteurs de l’économie et employant 48 664 travailleurs et rien qu’au cours du premier trimestre 2009, 281 ont vu le jour et occupent 1 489 personnes. Les dispositifs mis en place par les pouvoirs publics ont fortement contribué à la création de ces PME et les ont soutenues tout au long de leur évolution jusqu’à ce qu’elles fussent en mesure de se prendre en charge et, comme on dit, «voler de leurs propres ailes». ANSEJ, CNAC, FGAR, ANGEM et autres avantages accordés par l’Etat ont accouché de ces petites entités économiques qui continuent à créer des richesses tout en employant des dizaines de milliers de travailleurs. Aujourd’hui, le chiffre officiel du chômage avancé par les autorités à Annaba est de 12%.

C’est  surtout le secteur de l’agroalimentaire qui commence à renaître et donne lieu à un intérêt particulier de la Direction des services agricoles avec les différents dispositifs mis en place dans le cadre du plan national de développement agricole et son pendant, le Fonds national de régulation et de développement agricole. Le contrat de performance signé par la DSA prévoit la production de 1 million de quintaux de tomate industrielle, quantité déjà dépassée en 2008 avec plus de 1,8 million de quintaux. C’est la résurrection de la filière et l’on voit les usines de transformation rouvrir les unes après les autres, encouragées par la subvention de 1, 5 DA/kg accordée au conserveur et 2 DA par kg livré à la transformation par le producteur. Les plaines de Chorfa, d’El Hadjar, de Kherraza, d’El Eulma renaissent de leurs cendres et la verdure a envahi les espaces laissés en jachère pendant plusieurs années ou convertis à d’autres cultures.
 
Aujourd’hui, à Annaba, ce sont surtout les industries de l’agroalimentaire qui sont en vogue. Pour le reste, il n’y a pratiquement que les hauts-fourneaux d’El Hadjar qui continuent à tourner et les cheminées de Fertial qui fument. Il faut dire que toutes les petites entreprises fabriquant divers articles, papier, fournitures scolaires, différents emballages, sacheries et autres tournent au ralenti et sont menacées de disparition. La cause première est l’importation sauvage tous azimuts. Annaba croule sous des tonnes de marchandises d’origine douteuse sans que personne ne s’inquiète des conséquences sur l’économie nationale. 
 

Mohamed Rahmani [LA TRIBUNE - 14-09-09]
Auteur : Lady Dewy infos sur l'auteur | contactez l'auteur | le site de l'auteur

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