Situé en plein cœur de la ville d’Annaba, le marché d’El-Hattab occupe un espace de choix de cette cité. En ce début du mois de Ramadhan, vers ce lieu converge, en effet, l’ensemble des quartiers de la coquette, ceux de la périphérie et ceux des localités qui ceinturent Annaba jusqu’à l’asphyxie. Qu’on en juge, pas moins de trois stations de bus se situent à proximité de cet important marché qui représente sans exagération aucune « le ventre de Annaba ». Dès sept heures du matin, et allant crescendo, l’activité au niveau de ce « centre commercial » de fortune ne connaît aucun répit , notamment durant les heures de pointe, ainsi ceux qui s’engouffrent à l’intérieur sont repoussés par ceux qui s’en échappent où la fièvre de l’achat et de la vente ne baisse qu’en fin journée. Alors les lampions s’allument pour laisser place à l’établissement des comptes et l’évaluation des recettes de la journée. Cependant le marché d’El-Hattab ne répond plus aux normes requises pour l’exercice qui lui est destiné.
En tout premier lieu, le portail de cet établissement fort achalandé ne dénote aucunement que l’on se trouve en présence d’un marché public mais plutôt d’un garage de ferrailleur ou tout crûment d’un dépôt quelconque. En second lieu, les étals ressemblent à tout ce que l’on peut imaginer, sauf à des étalages, au plan des semblants de râteliers. L’aile réservée aux étals de boucherie et de volailles, au même titre que les « pavillons » des fruits et légumes, l’on ne parvient plus à distinguer le parterre, tant il est fossilisé par des croûtes superposées de gadoue. En certains points, les coins sont infestés lorsque les déchets s’amoncellent au voisinage d’un marchand de fruits et à proximité duquel sont exposés des plateaux d’œufs. Les cageots de la sardine sont posés à même le sol constamment aspergé d’eau donnant l’impression que l’on entretient un cétacé, un éléphant en pleine savane ou un être déshydraté. Face au marché d’El-Hattab, est érigée aujourd’hui une tour d’habitations qui s’intègre bien avec le plan d’urbanisme futuriste de la ville d’Annaba. Que raconte-t-on devant cet édifice. Une activité débordante de déballage de marchandises tout produit confondu. Nous assistons au même moment dans un mouvement quasi-simultané au déchargement de carcasses sectionnées d’ovins, de bacs de volailles et de triperie et d’abats, de sacs de pommes de terre et de légumes de toutes sortes. Et dès l’entrée, de petits marchands vous proposent des produits maisons pour la préparation de Bourak et autres brick. Le torréfacteur fait jonction avec le marchand de pommes de terre et les produits de laitage concomitant avec ceux destinés aux ménages quotidiens, détergents, etc.
Le marché d’El-hattab n’est plus ni moins qu’un ensemble de baraquements vétustes, obsolètes ou l’on est envahi par un certain stresse tant il ne répond plus aux conditions actuelles qui régissent le commerce, la communication et aussi le savoir-vivre. Le marché d’El-Hattab, que l’on désigne de « centre commercial », mais qui n’est ni moins qu’un lieu sordide, maléfique. Voilà une décennie de cela, il fut la proie d’un sinistre qui a ravagé quelques 400 échoppes de fortune. En pénétrant à l’intérieur de ce labyrinthe l’on se pose immédiatement la question de savoir dans quel guêpier l’on est fourré. Le quartier, où est implanté ce souk, a pris l’allure d’un véritable « coupe-gorge » tant il évolue dans un environnement maffieux. Pour cette raison et d’autres, certaines âmes malintentionnées à l’étau ressemblant à la mâchoire d’une hyène, ne veulent lâcher prise. Contre vents et marées, ils considèrent que l’obscurantisme qui règne à El-Hattab fait « fructifier » leur « commerce » qui s’il n’est pas illicite, demeure intolérable et inadmissible tant dans sa forme que dans son fond. Ils ne peuvent aller à contre-courant de l’évolution de l’urbanisme, à défier l’évolution sociale en baignant dans la régression, et à favoriser la prolifération sournoise de maux sociaux au profit d’instinct….bestial. A signaler enfin que depuis le début du mois de carême et notamment dans l’après-midi, une foule impressionnante, composée dans sa majorité de vendeurs à la sauvette et autres pickpockets, assiège toute la zone où est implantée ce marché, y compris le rond-point. Les agents de police en charge de la sécurité dans les lieux, lesquels ressemblent beaucoup plus à la Mecque durant le pèlerinage, semblent ne peuvent rien faire face à des vagues humaines. Parfois, il est quasi impossible de se déplacer à l’intérieur de son enceinte, véritable « ventre de Annaba », du fait de son exiguïté et de son encombrement.
lestrepublicain - 29 Mai 2017- B. Salah-Eddine
Les Commentaires
Ce marché qui n'a que le nom, composé de bric et broc vetustes au milieu duquel sont étalés pêle-mêle des produits mals assortis à peine désirables qui repoussent dans le meilleurs des cas l'envie de les ingurgiter, ressemble plus à un dépot clandestin de produits médiocres dans un environnement insalubre qu'à un vrai marché ordonné, reglementé et structuré.
La question est simple, elle coule de source. Sommes-nous des êtres humains ou des animaux ? On ne comprend pas comment une telle situation peut être acceptée ? Même en atteignant le fond de l'abîme, du découragement et du désespoir, une chose pareille ne peut être tolérée.
Ne peut-il pas y avoir un parmi les résponsables de la ville, que cette situation inacceptable déclencherait en lui un sursaut d'orgueil pour mettre fin à cette dégradation qui nous placerait dorénavant au même niveau que l'animal ? Car accepter cela, c'est accepter l'humiliation, c'est mettre fin à sa dignité d'homme en la considérant avec moins d'égards. Ce qui signifie se résigner à la fatalité. C'est à dire s'éloigner encore davantage de tout espoir de regain de fierté humaine.
Bien sûr pendant le temps de la construction si d'abord construction il y aura, on déplacerait le marché actuel ailleurs.