"Le recul qui dit le désarroi au sommet"

"LIBERTE"Par Djilali Benyoub "le 28-02-2019 11:00" Censure du discours de GaÏd Salah à Tamanrasset Le recul qui dit le désarroi au sommet"Dans son discours d’hier au deuxième jour de sa visite à Tamanrasset, le général de corps d’armée, chef d’état-major et vice-ministre de la Défense, Ahmed Gaïd Salah, a changé de ton. Devant les officiers et les cadres à Tamanrasset, le chef d’état-major a tenu, hier, un discours qui n’est pas sorti du registre militaire, des missions et des activités de l’ANP. De quoi surprendre. Parce que la veille, il avait lancé une salve de reproches à ceux qui “sont manipulés”, entendre ceux qui sont sortis marcher contre le 5e mandat, qui ont répondu présent “à un appel anonyme”. Sa menace a été claire et n’est pas passée inaperçue puisque son allocution a été transmise en direct sur certaines chaînes de télévision. Aussi a-t-il assuré que l’ANP veillera au bon déroulement du scrutin du 18 avril. Le passage a été supprimé du discours répercuté sur le site du MDN et de l’agence APS. Ce qui a suscité bien des questions. Cela d’autant que le MDN a appelé des rédactions pour leur demander “d’éliminer” ce paragraphe perçu comme un parti pris pour le président Bouteflika. Que s’est-il passé pour décider aussi promptement de retirer le passage en question ? Qui a décidé de le retirer ? L’auteur lui-même ou l’a-t-on conseillé ? Pour quelle raison puisque le coup était déjà parti ? Quand bien même ce discours serait perçu comme une provocation d’autant plus qu’il s’inscrit dans la même veine que celui des partisans du 5e mandat menaçant quiconque de vouloir barrer la route à leur candidat. Ou alors, c’est que l’on s’est rendu à l’évidence en voyant le déferlement des Algériens dans les rues. Cette action justifie-t-elle pour autant un tel rétropédalage de Gaïd Salah ? Signe de panique ? Vraisemblablement, puisque nous assistons à des gestes qui tentent l’apaisement. Ce qui est l’autre axe de leur stratégie ; le premier étant d’essayer de faire peur et de défier les opposants au 5e mandat. Ou, à défaut, compter sur l’essoufflement du mouvement populaire qui vient de démontrer une capacité de mobilisation historique. Mais la machine est en marche, elle a pris une longueur d’avance et ne risque pas de s’arrêter. Il n’y a qu’à voir les slogans pour se rendre compte de la prise de conscience des Algériens et de leur détermination. C’est cet écho qui serait arrivé tardivement aux oreilles du général Gaïd Salah pour opérer son recul et tenter de rectifier le tir pour passer à autre chose le lendemain. Se serait-il ainsi rendu compte qu’il est allé trop loin, fait plus de politique, lui qui est appelé à rester neutre dans cette compétition ? Autre hypothèse : une voix en haut lieu l’aurait appelé pour le recadrer et lui aurait demandé de retirer ses propos pour éviter des dégâts. Ce qui expliquerait la célérité avec laquelle a été retiré le passage et la demande insistante auprès des rédactions de le censurer. Ce qui, en définitive, ne change rien à la donne vu que tout le monde connaît le fond de la pensée de Gaïd Salah en prenant connaissance du paragraphe expurgé. Les partisans du 5e mandat veulent aller jusqu’au bout à n’importe quel prix. Parce que “nous n’avons pas d’autre candidat”, avait avoué le coordinateur du FLN, Mouad Bouchareb qui, à son tour, s’est mis à censurer les députés. En tout état de cause, les signes de panique sont visibles à travers ces discours de la peur, du défi qui dénotent de la préparation d’un autre passage en force. Mais le scénario est faussé par l’incursion de la rue qui les pousse à revoir leur plan".