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Crise de l'énergie : que risque la France avec la suspension par Gazprom des livraisons de gaz russe ?

Publié le 01/09/2022
Crise de l'énergie : que risque la France avec la suspension par Gazprom des livraisons de gaz russe ? Si les autorités se veulent rassurantes sur la capacité de la France à se passer du gaz russe cet hiver, la situation en matière d'approvisionnement et de coût ne devrait pas s'améliorer en 2023. Loin de là. Crise de l'énergie : que risque la France avec la suspension par Gazprom des livraisons de gaz russe ? Crise de l'énergie : que risque la France avec la suspension par Gazprom des livraisons de gaz russe ? © Fournis par franceinfo Les robinets de Gazprom vers Engie sont désormais coupés : le géant russe de l'énergie a "complètement" suspendu, jeudi 1er septembre, ses acheminements de gaz à destination des infrastructures du groupe français. Cette décision, que Moscou justifie par des livraisons impayées côté tricolore, tarit un peu plus les flux de gaz russe vers la France, six mois après le début de la guerre en Ukraine. Et aggrave la crise de l'énergie à laquelle les autorités préparent les Français pour cet hiver, alors que les prix de gros de l'électricité s'envolent. Cette suspension des livraisons de gaz de Gazprom à Engie "n'est pas une bonne nouvelle, mais ce n'est pas une nouvelle absolument catastrophique", assure auprès de franceinfo Julien Teddé, dirigeant d'Opéra Energie, une entreprise de courtage. En premier lieu, "il n'y aura pas de coupure de gaz sur les ménages" dans les prochains mois, a réaffirmé Elisabeth Borne sur France Inter, jeudi matin. Ménages et entreprises traités différemment Entre les lignes, la Première ministre ouvre la voie à des restrictions appliquées aux entreprises. "Les coupures se feront sur les industriels", appuie Thierry Bros, professeur à Sciences Po Paris et spécialiste de l'énergie. "Si l'hiver est froid, on sera obligés de rationner le gaz pour en avoir", prolonge Julien Teddé. Ces probables coupures à venir pour les entreprises s'expliquent par une livraison incomplète en gaz pour les mois à venir. "La situation est difficile, insiste l'économiste et spécialiste de l'énergie Jean-Pierre Favennec. Même si les stocks de gaz sont à un assez haut niveau, à plus de 91%, cela ne représente que deux mois de consommation." "Il va donc falloir faire avec moins de gaz cet hiver." Jean-Pierre Favennec, spécialiste des questions d'énergie à franceinfo "Pour passer l'hiver, il faut des stocks pleins et des approvisionnements. En gros, il nous faut le minimum que Gazprom nous envoie aujourd'hui", abonde Thierry Bros. Avant la suspension des livraisons, jeudi, Engie a réduit à 4% la part du gaz que lui livrait Gazprom, contre 20% en temps normal. "Nous avons diversifié nos importations pour n'être plus dépendants qu'à hauteur de 9% du gaz russe", a rappelé mercredi Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique. Le groupe français a trouvé "d'autres sources d'approvisionnement", a voulu rassurer Elisabeth Borne, lundi soir, sur TMC. "On est plutôt confiant sur la possibilité de passer l'hiver en France sans gaz russe", a expliqué sur LCI Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), mardi. "A l'échelle de l'Europe, ce sera extrêmement compliqué" La raréfaction du gaz russe serait-elle presque indolore pour la France ? "Le risque d'un manque d'approvisionnement de gaz venant de Russie est plus européen que français, recadre Julien Teddé. La dépendance de la France au gaz est beaucoup moins forte que celle de la plupart des autres pays européens. Par exemple, l'industrie allemande est totalement shootée au gaz", image Philippe Chalmin, économiste spécialiste des questions énergétiques. Avant la décision de Vladimir Poutine d'envahir l'Ukraine, fin février, le gaz russe représentait même 40% de la consommation européenne. Au niveau continental, l'hiver s'annonce donc beaucoup plus rude. "Si Gazprom venait à arrêter complètement ses approvisionnements au sein de l'Europe, il manquerait à l'Europe l'équivalent de la moitié du mois de mars, ce qui serait un peu gênant pour passer l'hiver. A l'échelle de l'Europe, ce sera extrêmement compliqué", redoute Thierry Bros. Et dans ce contexte, l'économie française sera évidemment affectée. "Si demain la Russie devait couper totalement ses exportations de gaz vers l'Europe, cela se traduirait par un choc de 0,5 point minimum sur la croissance française." Bruno Le Maire, ministre de l'Economie dans "Les Echos" Pour atténuer le choc, des négociations sont en cours pour que l'Algérie augmente de moitié ses livraisons de gaz vers la France, dont 8% du gaz émane de ce pays. Mais les spécialistes estiment que cela ne suffirait pas à combler les manques à venir. "Les gros fournisseurs alternatifs, que sont la Norvège et l'Algérie, ne peuvent pas augmenter significativement leurs exportations", pointe Jean-Pierre Favennec. D'autres pays, "comme les Etats-Unis et le Qatar sont, quant à eux, au maximum de leur production, donc c'est extrêmement difficile de trouver des alternatives viables" au gaz russe. "Il ne faut pas se leurrer, appuie Philippe Chalmin. Si nous allons continuer à importer du gaz de Norvège et d'Algérie, nous allons surtout importer du gaz naturel liquéfié (GNL) des Etats-Unis ou du Qatar." Cette solution, qui consiste à acheminer du gaz de manière liquide depuis d'autres continents, a aussi ses inconvénients. "Par définition, c'est le gaz le plus cher qui soit, explique Julien Teddé, et l'Europe va être en concurrence avec le Royaume-Uni, le Japon ou la Chine." "On a des tensions sur le marché du GNL", prolonge Philippe Chalmin. Des prix qui explosent en 2023 ? Les écueils du GNL sont également environnementaux et logistiques. Transformer le gaz liquéfié en matière gazeuse à l'arrivée des bateaux dans les ports européens nécessite des infrastructures spécifiques et coûteuses. "Or, la France n'a pas assez de capacités de gazéification de ce GNL pour faire face à la situation actuelle", assure Jean-Pierre Favennec. "L'Allemagne, elle, n'en a pas du tout", poursuit Philippe Chalmin, de quoi limiter les sources d'approvisionnement pour une partie de l'Europe. Dans tous les cas, la situation risque d'être très tendue pendant des mois, voire plusieurs années. D'abord, la question de l'approvisionnement en gaz devrait irrémédiablement revenir au deuxième semestre 2023. "Le vrai problème, ce n'est pas l'hiver prochain, évacue Julien Teddé, c'est l'hiver suivant [2024]. Là, on entame l'hiver avec un stock de gaz plein, car les cuves ont été remplies au cours du premier semestre, quand les livraisons de gaz russe ne baissaient pas." "La situation sera bien différente l'année prochaine, avec des acheminements taris." Julien Teddé, courtier chez Opéra Energie à franceinfo Ensuite, "on peut estimer que le problème du gaz et de l'électricité sera moins un problème d'approvisionnement qu'un problème de prix", estime Philippe Chalmin. Les ménages, qui bénéficient actuellement d'un bouclier tarifaire figeant les prix jusqu'à la fin de l'année 2022, seront exposés à "une hausse des prix de l'énergie en 2023", a prévenu Bruno Le Maire dans Les Echos, jeudi, même s'il se veut rassurant : "La hausse sera contenue, raisonnable" et inférieure à 40%, comme c'est le cas en Allemagne.
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Si les autorités se veulent rassurantes sur la capacité de la France à se passer du gaz russe cet hiver, la situation en matière d'approvisionnement et de coût ne devrait pas s'améliorer en 2023. Loin de là.

Crise de l'énergie : que risque la France avec la suspension par Gazprom des livraisons de gaz russe ?
Crise de l'énergie : que risque la France avec la suspension par Gazprom des livraisons de gaz russe ?
© Fournis par franceinfo
Les robinets de Gazprom vers Engie sont désormais coupés : le géant russe de l'énergie a "complètement" suspendu, jeudi 1er septembre, ses acheminements de gaz à destination des infrastructures du groupe français. Cette décision, que Moscou justifie par des livraisons impayées côté tricolore, tarit un peu plus les flux de gaz russe vers la France, six mois après le début de la guerre en Ukraine. Et aggrave la crise de l'énergie à laquelle les autorités préparent les Français pour cet hiver, alors que les prix de gros de l'électricité s'envolent.

Cette suspension des livraisons de gaz de Gazprom à Engie "n'est pas une bonne nouvelle, mais ce n'est pas une nouvelle absolument catastrophique", assure auprès de franceinfo Julien Teddé, dirigeant d'Opéra Energie, une entreprise de courtage. En premier lieu, "il n'y aura pas de coupure de gaz sur les ménages" dans les prochains mois, a réaffirmé Elisabeth Borne sur France Inter, jeudi matin.


Ménages et entreprises traités différemment
Entre les lignes, la Première ministre ouvre la voie à des restrictions appliquées aux entreprises. "Les coupures se feront sur les industriels", appuie Thierry Bros, professeur à Sciences Po Paris et spécialiste de l'énergie. "Si l'hiver est froid, on sera obligés de rationner le gaz pour en avoir", prolonge Julien Teddé.

Ces probables coupures à venir pour les entreprises s'expliquent par une livraison incomplète en gaz pour les mois à venir. "La situation est difficile, insiste l'économiste et spécialiste de l'énergie Jean-Pierre Favennec. Même si les stocks de gaz sont à un assez haut niveau, à plus de 91%, cela ne représente que deux mois de consommation."

"Il va donc falloir faire avec moins de gaz cet hiver."

Jean-Pierre Favennec, spécialiste des questions d'énergie
à franceinfo

"Pour passer l'hiver, il faut des stocks pleins et des approvisionnements. En gros, il nous faut le minimum que Gazprom nous envoie aujourd'hui", abonde Thierry Bros. Avant la suspension des livraisons, jeudi, Engie a réduit à 4% la part du gaz que lui livrait Gazprom, contre 20% en temps normal. "Nous avons diversifié nos importations pour n'être plus dépendants qu'à hauteur de 9% du gaz russe", a rappelé mercredi Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique.

Le groupe français a trouvé "d'autres sources d'approvisionnement", a voulu rassurer Elisabeth Borne, lundi soir, sur TMC. "On est plutôt confiant sur la possibilité de passer l'hiver en France sans gaz russe", a expliqué sur LCI Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), mardi.

"A l'échelle de l'Europe, ce sera extrêmement compliqué"
La raréfaction du gaz russe serait-elle presque indolore pour la France ? "Le risque d'un manque d'approvisionnement de gaz venant de Russie est plus européen que français, recadre Julien Teddé. La dépendance de la France au gaz est beaucoup moins forte que celle de la plupart des autres pays européens. Par exemple, l'industrie allemande est totalement shootée au gaz", image Philippe Chalmin, économiste spécialiste des questions énergétiques. Avant la décision de Vladimir Poutine d'envahir l'Ukraine, fin février, le gaz russe représentait même 40% de la consommation européenne.


Au niveau continental, l'hiver s'annonce donc beaucoup plus rude. "Si Gazprom venait à arrêter complètement ses approvisionnements au sein de l'Europe, il manquerait à l'Europe l'équivalent de la moitié du mois de mars, ce qui serait un peu gênant pour passer l'hiver. A l'échelle de l'Europe, ce sera extrêmement compliqué", redoute Thierry Bros. Et dans ce contexte, l'économie française sera évidemment affectée.

"Si demain la Russie devait couper totalement ses exportations de gaz vers l'Europe, cela se traduirait par un choc de 0,5 point minimum sur la croissance française."

Bruno Le Maire, ministre de l'Economie
dans "Les Echos"

Pour atténuer le choc, des négociations sont en cours pour que l'Algérie augmente de moitié ses livraisons de gaz vers la France, dont 8% du gaz émane de ce pays.

Mais les spécialistes estiment que cela ne suffirait pas à combler les manques à venir. "Les gros fournisseurs alternatifs, que sont la Norvège et l'Algérie, ne peuvent pas augmenter significativement leurs exportations", pointe Jean-Pierre Favennec. D'autres pays, "comme les Etats-Unis et le Qatar sont, quant à eux, au maximum de leur production, donc c'est extrêmement difficile de trouver des alternatives viables" au gaz russe.

"Il ne faut pas se leurrer, appuie Philippe Chalmin. Si nous allons continuer à importer du gaz de Norvège et d'Algérie, nous allons surtout importer du gaz naturel liquéfié (GNL) des Etats-Unis ou du Qatar." Cette solution, qui consiste à acheminer du gaz de manière liquide depuis d'autres continents, a aussi ses inconvénients. "Par définition, c'est le gaz le plus cher qui soit, explique Julien Teddé, et l'Europe va être en concurrence avec le Royaume-Uni, le Japon ou la Chine." "On a des tensions sur le marché du GNL", prolonge Philippe Chalmin.

Des prix qui explosent en 2023 ?
Les écueils du GNL sont également environnementaux et logistiques. Transformer le gaz liquéfié en matière gazeuse à l'arrivée des bateaux dans les ports européens nécessite des infrastructures spécifiques et coûteuses. "Or, la France n'a pas assez de capacités de gazéification de ce GNL pour faire face à la situation actuelle", assure Jean-Pierre Favennec. "L'Allemagne, elle, n'en a pas du tout", poursuit Philippe Chalmin, de quoi limiter les sources d'approvisionnement pour une partie de l'Europe.

Dans tous les cas, la situation risque d'être très tendue pendant des mois, voire plusieurs années. D'abord, la question de l'approvisionnement en gaz devrait irrémédiablement revenir au deuxième semestre 2023. "Le vrai problème, ce n'est pas l'hiver prochain, évacue Julien Teddé, c'est l'hiver suivant [2024]. Là, on entame l'hiver avec un stock de gaz plein, car les cuves ont été remplies au cours du premier semestre, quand les livraisons de gaz russe ne baissaient pas."

"La situation sera bien différente l'année prochaine, avec des acheminements taris."

Julien Teddé, courtier chez Opéra Energie
à franceinfo

Ensuite, "on peut estimer que le problème du gaz et de l'électricité sera moins un problème d'approvisionnement qu'un problème de prix", estime Philippe Chalmin. Les ménages, qui bénéficient actuellement d'un bouclier tarifaire figeant les prix jusqu'à la fin de l'année 2022, seront exposés à "une hausse des prix de l'énergie en 2023", a prévenu Bruno Le Maire dans Les Echos, jeudi, même s'il se veut rassurant : "La hausse sera contenue, raisonnable" et inférieure à 40%, comme c'est le cas en Allemagne.
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