La «dawla», le Beylik et la «houkouma» !
par El-Houari Dilmi
L'Algérien a une perception élastique de la loi, au point que ce qui est valable pour les autres ne l'est pas pour lui. Si l'Algérien lambda réclame que la justice soit au-dessus de tous, il est le premier à fouler au pied les lois de la République. Cas concret : si un conducteur grille un feu rouge et se fait interpeller par le policier en faction, il parle de «hogra» et insulte la «dawla». Mais quelle interprétation fait l'Algérien de la rue de la «dawla», du «beylik» et de la «houkouma» ? Pour nous autres dézédiens, la «dawla» fait certes peur mais personne ne la respecte. Le «beylik» c'est ne pas payer son loyer, sa facture d'électricité et d'eau, et accuser la «houkouma» de vouloir mettre sa main dans la poche de celui pour qui «ragda we tmandji» est une «culture vernaculaire» ! Si sa société ne le paie pas bien, il puise directement dans la caisse et parle d'un «droit légitime». Si la facture d'eau est trop salée, il pique carrément de la conduite principale et parle de sa «part» du gigantesque gâteau national. L'Algérien commun n'aime pas faire la queue. Il veut passer avant tout le monde, même s'il est le dernier à arriver.
Histoire vraie qui s'est passée sous nos yeux effarés : alors que nous nous trouvions à bord d'un véhicule taxi, le conducteur s'arrête devant un feu rouge, attendant que celui-ci passe au vert. Soudain, un jeune à bord d'un bolide rutilant, le dépasse et lui décoche la bouche salivante : «bat h'na kheir» (passe la nuit ici, c'est mieux !»). Rattrapé quelques mètres plus loin, le jeune aux cheveux hirsutes et les yeux bouffis, demande pardon : «smahli Si l'hadj», dit-il au conducteur du véhicule taxi. Sous nos cieux particuliers, on peut commettre le pire des forfaits et demander aussitôt «pardon». Comme si de rien n'était. Même quand il s'ennuie, veut «tuer» le temps, le dézédien s'amuse à «jouer» avec la loi, l'ordre établi. Comme un enfant qui frappe à une porte avant de s'enfuir. Sauf qu'une légende bien de chez nous dit que pour parvenir à faire entendre sa voix jusque dans l'oreille d'un homme très haut juché sur un arbre, fut-il double centenaire, on n'a pas d'autre choix que d'acheter (à crédit) une tronçonneuse, la dernière sur le marché, et courir vite pour couper l'arbre à la racine et avec lui la branche sur laquelle est toujours assis imperturbable, l'homme très haut juché...
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par El-Houari Dilmi
L'Algérien a une perception élastique de la loi, au point que ce qui est valable pour les autres ne l'est pas pour lui. Si l'Algérien lambda réclame que la justice soit au-dessus de tous, il est le premier à fouler au pied les lois de la République. Cas concret : si un conducteur grille un feu rouge et se fait interpeller par le policier en faction, il parle de «hogra» et insulte la «dawla». Mais quelle interprétation fait l'Algérien de la rue de la «dawla», du «beylik» et de la «houkouma» ? Pour nous autres dézédiens, la «dawla» fait certes peur mais personne ne la respecte. Le «beylik» c'est ne pas payer son loyer, sa facture d'électricité et d'eau, et accuser la «houkouma» de vouloir mettre sa main dans la poche de celui pour qui «ragda we tmandji» est une «culture vernaculaire» ! Si sa société ne le paie pas bien, il puise directement dans la caisse et parle d'un «droit légitime». Si la facture d'eau est trop salée, il pique carrément de la conduite principale et parle de sa «part» du gigantesque gâteau national. L'Algérien commun n'aime pas faire la queue. Il veut passer avant tout le monde, même s'il est le dernier à arriver.
Histoire vraie qui s'est passée sous nos yeux effarés : alors que nous nous trouvions à bord d'un véhicule taxi, le conducteur s'arrête devant un feu rouge, attendant que celui-ci passe au vert. Soudain, un jeune à bord d'un bolide rutilant, le dépasse et lui décoche la bouche salivante : «bat h'na kheir» (passe la nuit ici, c'est mieux !»). Rattrapé quelques mètres plus loin, le jeune aux cheveux hirsutes et les yeux bouffis, demande pardon : «smahli Si l'hadj», dit-il au conducteur du véhicule taxi. Sous nos cieux particuliers, on peut commettre le pire des forfaits et demander aussitôt «pardon». Comme si de rien n'était. Même quand il s'ennuie, veut «tuer» le temps, le dézédien s'amuse à «jouer» avec la loi, l'ordre établi. Comme un enfant qui frappe à une porte avant de s'enfuir. Sauf qu'une légende bien de chez nous dit que pour parvenir à faire entendre sa voix jusque dans l'oreille d'un homme très haut juché sur un arbre, fut-il double centenaire, on n'a pas d'autre choix que d'acheter (à crédit) une tronçonneuse, la dernière sur le marché, et courir vite pour couper l'arbre à la racine et avec lui la branche sur laquelle est toujours assis imperturbable, l'homme très haut juché...